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FIQ (Fédération Interprofessionnelle de la santé du Québec)

La réorganisation en santé mentale à Montréal met en péril la qualité des services requis par une clientèle lourde

Montréal, le 28 avril 2008  —  Près d’un an après avoir sonné l’alarme quant aux risques associés à un manque de planification dans la mise en œuvre de la réorganisation des services en santé mentale sur le territoire de Montréal, les syndicats tracent un portrait inquiétant de la situation dans laquelle se retrouvent des patients très vulnérables. Constatant que l’Agence de santé et de services sociaux de Montréal n’a pas été en mesure d’assurer la coordination des transferts de clientèles et de ressources humaines prévus dans le plan d’action ministériel intitulé paradoxalement La force des liens, l’Intersyndicale en santé mentale réclame une intervention du ministre Philippe Couillard.

Dans le but de rapprocher les services de première ligne des usagers, le plan d’action prévoit le transfert vers les centres de santé et de services sociaux (CSSS) des services auparavant dispensés dans les grands centres hospitaliers. Or, loin de l’objectif d’assurer un meilleur suivi médical et social de la clientèle que la réorganisation est censée poursuivre, les ratés de sa mise en œuvre font en sorte que les listes d’attente s’allongent et que les conséquences des pénuries de personnel spécialisé vont en s’aggravant. Des patients autrefois étroitement suivis se retrouvent sans médecin de famille attitré, coupés du soutien des intervenants qui connaissent leur état, voire laissés à eux-mêmes.

En juin 2007, le comité de travail intersyndical en santé mentale — composé de l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS), de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ), de la Fédération des professionnèles (FP-CSN) et de la Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS-CSN) ainsi que du Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) — avait réclamé une mise en œuvre coordonnée et concertée du plan d’action. Les organisations syndicales constatent maintenant que non seulement leurs recommandations n’ont pas été retenues mais que les conséquences appréhendées du manque de planification de l’Agence de Montréal se concrétisent déjà sur le terrain.

« Il s’agit d’une clientèle hautement vulnérable, souvent des cas lourds, pour qui la continuité des services est essentielle, ont rappelé les porte-parole syndicaux. L’état de ces patients peut se détériorer rapidement du seul fait qu’ils perdent leurs repères. » De fait, les intervenants rapportent plusieurs exemples de patients dépourvus laissés sans suivi, faute de ressources suffisantes.

Remplacer l’encadrement hospitalier suppose d’importantes ressources quine sont pas disponibles dans tous les CSSS. Alors que le plan initial de réorganisation prévoyait le redéploiement massif d’intervenants en santé mentale des hôpitaux vers les CSSS pour suivre la clientèle, c’est davantage de transfert de budgets dont les établissements discutent aujourd’hui.

L’Intersyndicale redoute les répercussions de la perte d’expertise associée à cette façon de faire. L’intervention auprès de personnes souffrant de graves problèmes de santé mentale suppose des compétences et une expérience spécifiques qui ne s’acquièrent pas du jour au lendemain.

Alors que la clientèle commence à affluer, les CSSS sont exposés à des difficultés de recrutement, compte tenu des pénuries de personnel existantes dans ce secteur, notamment pour les titres d’emploi d’infirmière, de psychologue, de travailleur social et d’ergothérapeute.

Plusieurs CSSS censés accueillir les patients jusque là traités en centre hospitalier psychiatrique auront donc du mal à s’acquitter de leurs nouvelles responsabilités, ce qui pose un problème sérieux de continuité des services. Cette clientèle lourde requiert pourtant une prise en charge immédiate.

Les organisations syndicales ont proposé en vain l’établissement d’un protocole de transfert régional pour les intervenants en santé mentale. La partie patronale a opté pour une négociation pour chacun des corridors de services, un processus beaucoup plus long, susceptible de créer des iniquités dans le réseau et de la concurrence entre les établissements désireux d’attirer le personnel.

A l’approche de la semaine de la santé mentale, les syndicats annoncent qu’ils vont se coordonner afin de négocier dans chaque établissement concerné un protocole de transfert en vue d’atténuer l’impact de la réforme sur la clientèle touchée. Mais une intervention ministérielle s’impose afin de s’assurer qu’il y ait une volonté de négocier de part et d’autre pour garantir une meilleure planification.